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Interception des précipitations

Qu'est-ce que c'est ?

L’interception des précipitations correspond à l’évaporation de l’eau, liquide ou solide, par les houppiers des arbres, aussi bien par les feuilles que par les organes ligneux. Lors d’une précipitation, l’eau suit plusieurs trajets dans l’écosystème :

Notes : nous ne considèrerons pas ici le cas de l’interception de la neige, phénomène mal documenté. Par ailleurs, les couverts peuvent aussi condenser le brouillard dont une partie va s’égoutter sous le couvert.

Comment mesurer ce flux ? Quelle est l'unité de cette grandeur ?

La mesure de l’interception se fait de façon indirecte : on la calcule par différence entre l’eau qui arrive au-dessus du couvert et celle qui arrive à la surface du sol, selon la formule : In = Pi – Ps - Pt, où In représente l’interception, Pi est la pluie incidente, Ps est la pluie qui arrive directement au sol et Pt est la quantité d’eau qui s’écoule le long des troncs vers le sol.

 
Pluviomètre au sol
Ecoulement de tronc

Ci-dessus : Un système de recueil des pluies s’écoulant le long des troncs (photo UR BEF, INRA-Nancy).

Ci-contre : Mesure de pluie au sol à l’aide d’un réseau de pluviomètres à lecture directe.

 
Les mesures utilisent des pluviomètres : pour Pi, un pluviomètre de référence, disposé à proximité de la parcelle étudiée dans une clairière ou bien au-dessus du couvert. Pour Ps, on utilise un ensemble de pluviomètres répartis sous le couvert au niveau du sol. Comme la pluie arrivant au sol est un phénomène très variable dans l’espace, sa mesure précise nécessite un nombre important de pluviomètres sous couvert, souvent de l’ordre de 20 à 40. Enfin, Pt est mesuré par des collecteurs disposés en spirale ou en anneau autour des troncs (souvent entre 5 et 10 pour un peuplement). Chaque collecteur est relié à un conteneur de grande capacité. La mesure de ces différents termes est réalisée juste après chaque épisode pluvieux.
L’interception des précipitations s’exprime en mm d’eau. Par exemple une pluie de 5 mm peut conduire à une interception de 1 mm, donc à un gain net de 4 mm pour la forêt. On exprime souvent l’interception en pourcentage de la pluie incidente : dans cet exemple l’interception est de 20% de la pluie.

Comment ce flux d'eau est-il contrôlé ?

De façon purement physique, l’interception des précipitations dépend de l’intensité de la pluie, du développement foliaire des arbres (indice foliaire, voir indice foliaire et phénologie) et des conditions climatiques. Pendant et après l’épisode pluvieux, le taux d’évaporation va dépendre de l’énergie arrivant au niveau des houppiers qui peut être mesurée par l’ETP (voir fiche météorologie).

Relation Interception et LAI
Relation entre l’interception des précipitations (en % de la pluie incidente) et l’indice foliaire (LAI) de différents peuplements de hêtres et de résineux.
Des pluies fines sont plus complètement interceptées que des pluies fortes : en conséquence, à pluies égales, l’interception est plus importante en climat océanique qu’en climat continental. La phénologie joue évidemment un rôle essentiel, notamment pour les peuplements décidus : en hiver l’interception y est plus faible que pendant la période feuillée.
Les variations d’interception des pluies entre peuplements sont liées à celles de leur indice foliaire (voir figure ci-contre), mais cette relation est complexe : si globalement In augmente avec le LAI, on observe que certains peuplements présentent des valeurs d’interception plus fortes que celles attendues. C’est notamment le cas des couverts « clairs » de pins, mais aussi d’autres peuplements juste après une éclaircie.

Note : pendant le processus d’interception, le feuillage est mouillé et la transpiration des arbres est ralentie voire stoppée. Ceci est pris en compte par le modèle Biljou©.

Comment varie cette grandeur dans le temps ?

Au début d’un épisode pluvieux, les houppiers commencent par accumuler l’eau sur leurs surfaces d’interception. Puis, lorsque ces surfaces commencent à être saturées, l’eau s’écoule vers le sol. On définit ainsi la capacité de saturation d’un couvert qui est la quantité d’eau maximale pouvant être retenue par le couvert. Typiquement cette capacité est de l’ordre de 1 à 2 mm : elle est élevée pour les résineux à fort indice foliaire et faible pour les peuplements feuillus « clairs ».

Comment varie cette grandeur spatialement ?

L’interception des précipitations est un phénomène très variable dans l’espace, en relation avec l’hétérogénéité souvent importante de la structure des couverts forestiers. Les mesures montrent que, juste après une pluie, certains pluviomètres au sol captent très peu d’eau alors que d’autres en reçoivent plus que la pluie incidente ! C’est le phénomène d’entonnoir, avec les conditions locales de concentration de l’eau par des écoulements préférentiels dans les houppiers. Aussenac (1970) a montré qu’il existait une variation de la quantité de pluie arrivant au sol, en fonction de la distance au tronc.

Quelques chiffres clés

Les valeurs d’interception sont très variables selon l’espèce, la sylviculture, le climat, la saison, mais on peut en donner quelques ordres de grandeur. Pour des conditions climatiques tempérées, l’interception varie de 15 à 40 % de la pluie incidente. Globalement, les résineux interceptent une plus grande quantité de pluie (In entre 30 et 40%) que les feuillus (In entre 15 et 30%), pour deux raisons principales : les résineux montrent généralement un indice foliaire plus élevé, et, à l’exception des mélèzes, ils portent des feuilles toute l’année. Ainsi, à climat égal, les peuplements sempervirents se caractérisent souvent par une plus faible disponibilité en eau dans le sol que les forêts décidues.
De plus, la quantité d’eau s’écoulant le long des troncs (Pt) est très dépendante des espèces. Deux exemples extrêmes sont les hêtres, à écorce lisse pour lesquels Pt peut atteindre, voire dépasser 10% de la pluie incidente, par opposition aux espèces à écorce rugueuse comme le chêne où Pt est seulement de l’ordre de 1 à 2% de la pluie. Si ce flux d’eau est relativement modeste, il présente l’intérêt d’alimenter le sol au pied de l’arbre.

Relation Interception et LAI

Valeurs moyennes de l’interception des précipitations, en % de la pluie incidente, mesurées sur quelques placettes du réseau d’observation Renecofor de l’ONF.

Références utiles

Aussenac G (1970) Action du couvert forestier sur la distribution au sol des précipitations. Annales des sciences forestières, 27 (4), 383-399.

Aussenac G et Boulangeat C (1980) Interception des précipitations et évapotranspiration réelle dans des peuplements de feuillus (Fagus sylvatica L.) et de résineux (Pseudotsuga menziesii (Mirb) Franco). Annales des sciences forestières, 37 (2), 91-107.

Ulrich E, Lelong N, Lanier M, Schneider (1995) Interception des pluies en forêt : facteurs déterminants. Interprétation des mesures réalisées dans le sous-réseau CATAENAT de RENECOFOR. ONF, Bulletin technique n°30.

Llorens P (1997) Rainfall interception by a Pinus sylvestris forest patch overgrown in a Mediterranean mountainous abandoned area .2. Assessment of the applicability of Gash's analytical model. Journal of Hydrology 199: 3-4.

Loustau D, Berbigier P, Granier A, Elhadjmoussa F (1992) Interception loss, throughfall and stemflow in a maritime pine stand. 1.Variability of throughfall and stemflow beneath the pine canopy. The HartX-Synthesis: an experimental approach to water and carbon exchange of a Scots pine plantation. Journal of Hydrology 138: 449-467.

Rowe L K (1983) Rainfall interception by an evergreen beech forest, Nelsin, New Zealand. Journal of Hydrology, 66, 143-158.

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