BILJOU
Modèle de bilan hydrique forestier
- UMR Silva
L’interception des précipitations correspond à l’évaporation de l’eau, liquide ou solide, par les houppiers des arbres, aussi bien par les feuilles que par les organes ligneux. Lors d’une précipitation, l’eau suit plusieurs trajets dans l’écosystème :
Notes : nous ne considèrerons pas ici le cas de l’interception de la neige, phénomène mal documenté. Par ailleurs, les couverts peuvent aussi condenser le brouillard dont une partie va s’égoutter sous le couvert.
La mesure de l’interception se fait de façon indirecte : on la calcule par différence entre l’eau qui arrive
au-dessus du couvert et celle qui arrive à la surface du sol, selon la formule : In = Pi – Ps - Pt,
où In représente l’interception, Pi est la pluie incidente,
Ps est la pluie qui arrive directement au sol et Pt est la quantité d’eau qui s’écoule le long des troncs
vers le sol.
Ci-dessus : Un système de recueil des pluies s’écoulant le long des troncs (photo UR BEF, INRA-Nancy).
Ci-contre : Mesure de pluie au sol à l’aide d’un réseau de pluviomètres à lecture directe.
De façon purement physique, l’interception des précipitations dépend de l’intensité de la pluie, du développement foliaire des arbres (indice foliaire, voir indice foliaire et phénologie) et des conditions climatiques. Pendant et après l’épisode pluvieux, le taux d’évaporation va dépendre de l’énergie arrivant au niveau des houppiers qui peut être mesurée par l’ETP (voir fiche météorologie).
Au début d’un épisode pluvieux, les houppiers commencent par accumuler l’eau sur leurs surfaces d’interception. Puis, lorsque ces surfaces commencent à être saturées, l’eau s’écoule vers le sol. On définit ainsi la capacité de saturation d’un couvert qui est la quantité d’eau maximale pouvant être retenue par le couvert. Typiquement cette capacité est de l’ordre de 1 à 2 mm : elle est élevée pour les résineux à fort indice foliaire et faible pour les peuplements feuillus « clairs ».
L’interception des précipitations est un phénomène très variable dans l’espace, en relation avec l’hétérogénéité souvent importante de la structure des couverts forestiers. Les mesures montrent que, juste après une pluie, certains pluviomètres au sol captent très peu d’eau alors que d’autres en reçoivent plus que la pluie incidente ! C’est le phénomène d’entonnoir, avec les conditions locales de concentration de l’eau par des écoulements préférentiels dans les houppiers. Aussenac (1970) a montré qu’il existait une variation de la quantité de pluie arrivant au sol, en fonction de la distance au tronc.
Les valeurs d’interception sont très variables selon l’espèce, la sylviculture, le climat, la saison, mais
on peut en donner quelques ordres de grandeur. Pour
des conditions climatiques tempérées, l’interception varie de 15 à 40 % de la pluie incidente. Globalement,
les résineux interceptent une plus grande quantité de pluie (In entre 30 et 40%) que les feuillus (In entre
15 et 30%), pour deux raisons principales : les résineux montrent généralement un indice foliaire plus
élevé, et, à l’exception des mélèzes, ils portent des feuilles toute l’année. Ainsi, à climat égal, les
peuplements sempervirents se caractérisent souvent par une plus faible disponibilité en eau dans le sol que
les forêts décidues.
De plus, la quantité d’eau s’écoulant le long des troncs (Pt) est très dépendante des espèces. Deux
exemples extrêmes sont les hêtres, à écorce lisse pour lesquels Pt peut atteindre, voire dépasser 10% de
la pluie incidente, par opposition aux espèces à écorce rugueuse comme le chêne où Pt est seulement de
l’ordre de 1 à 2% de la pluie. Si ce flux d’eau est relativement modeste, il présente l’intérêt d’alimenter
le sol au pied de l’arbre.
Valeurs moyennes de l’interception des précipitations, en % de la pluie incidente, mesurées sur quelques placettes du réseau d’observation Renecofor de l’ONF.
Aussenac G (1970) Action du couvert forestier sur la distribution au sol des précipitations. Annales des sciences forestières, 27 (4), 383-399.
Aussenac G et Boulangeat C (1980) Interception des précipitations et évapotranspiration réelle dans des peuplements de feuillus (Fagus sylvatica L.) et de résineux (Pseudotsuga menziesii (Mirb) Franco). Annales des sciences forestières, 37 (2), 91-107.
Ulrich E, Lelong N, Lanier M, Schneider (1995) Interception des pluies en forêt : facteurs déterminants. Interprétation des mesures réalisées dans le sous-réseau CATAENAT de RENECOFOR. ONF, Bulletin technique n°30.
Llorens P (1997) Rainfall interception by a Pinus sylvestris forest patch overgrown in a Mediterranean mountainous abandoned area .2. Assessment of the applicability of Gash's analytical model. Journal of Hydrology 199: 3-4.
Loustau D, Berbigier P, Granier A, Elhadjmoussa F (1992) Interception loss, throughfall and stemflow in a maritime pine stand. 1.Variability of throughfall and stemflow beneath the pine canopy. The HartX-Synthesis: an experimental approach to water and carbon exchange of a Scots pine plantation. Journal of Hydrology 138: 449-467.
Rowe L K (1983) Rainfall interception by an evergreen beech forest, Nelsin, New Zealand. Journal of Hydrology, 66, 143-158.