BILJOU
Modèle de bilan hydrique forestier
- UMR Silva
L’évapotranspiration réelle (ETR, en mm) d’un couvert végétal est la somme des différents flux d’eau retournant
vers l’atmosphère sous forme de vapeur :
ETR
=
transpiration
des arbres
+
évaporation du sol et transpiration du sous-étage herbacé et arbustif
+
évaporation de l'eau interceptée par le couvert
Les variables du climat déterminent l’ETR des surfaces végétales ; ce sont :
La transpiration des arbres est le plus souvent le terme prépondérant de l’ETR. Lorsque le peuplement est fermé et l’indice foliaire élevé, l’évapotranspiration du sol et de la strate herbacée est souvent négligeable, car la demande climatique est très faible au niveau du sol.
Il existe maintenant une méthodologie éprouvée qui permet de mesurer le flux de vapeur d’eau au-dessus d’un couvert : c’est la méthode des corrélations turbulentes. Cette méthode associe un anémomètre sonique tridimentionnel et un analyseur de gaz rapide.
Ci-dessus : anémomètre sonique tridimensionnel installé au sommet d'une tour à flux (système de mesure des corrélations turbulentes).
Ci-contre : tour de mesure des flux au-dessus de la forêt de Hesse (57), site géré par l’INRA-Nancy
Une autre méthode, dite du bilan hydrique permet de calculer l’ETR à partir de la mesure variations
de contenu en eau du sol et celle des précipitations sous couvert. Cette méthode n’a pas une bonne
résolution temporelle, le pas de temps étant le plus souvent de l’ordre de la semaine. De plus, la
forte variabilité spatiale de la teneur en eau dans le sol, liée à celle du prélèvement d’eau du sol
par les arbres impose un nombre important de répétitions.
La transpiration des arbres dépend directement de l’énergie qui arrive au niveau de leur houppier.
Cette énergie est quantifiée par l’évapotranspiration potentielle (ETP, voir
fiche météorologie).
L’ETP est une fonction du rayonnement global, de la température et de l’humidité de l’air et de la
vitesse du vent. Nos très nombreuses mesures de flux de sève ont montré que la transpiration des
arbres en peuplement fermé, à fort indice foliaire et en l’absence de contrainte hydrique, était
au maximum égale à 75% de l’ETP. Lorsque l’indice foliaire est plus faible (au-dessous de 6), la
transpiration diminue. En particulier, chez les feuillus, pendant les phases d’expansion foliaire et
de jaunissement et chute des feuilles, la transpiration des arbres n’est pas maximale.
Lorsqu’il y a une sécheresse, la réserve en eau relative du sol (REW) diminue. Lorsque REW descend
au-dessous de 0.4, les arbres subissent une contrainte hydrique qui se traduit notamment par la
fermeture des stomates et donc par la diminution de la transpiration. Il est intéressant de savoir
que ce seuil de contrainte hydrique est générique pour un grand nombre d’espèces et de types de
sol. Il correspond à un niveau où l’extraction d’eau par les racines nécessite une succion
importante.
Une autre composante de l’ETR est l’évapotranspiration du sous-étage, qui est égale à la somme de
l’évaporation du sol et de la transpiration de la strate herbacée. La strate arbustive, sous-étage
au sens sylvicole souvent appelé taillis (par exemple composé de charme dans un peuplement de chêne
ou de hêtre) et la régénération dès lors qu’elle atteint 1.5 m de haut, sont intégrées dans
l’indice foliaire du total peuplement. L’énergie disponible au niveau de la strate herbacée ou du
sol nu pour évaporer l’eau conditionne leur évapotranspiration, davantage que la composition
floristique. Ainsi, le modèle BILJOU© calcule le rayonnement global qui arrive à ce niveau. Ce
calcul fait intervenir le rayonnement global incident (voir fiche météorologie) et son
extinction à travers l’indice foliaire total du peuplement.
Dans un peuplement, il existe de fortes variations de la transpiration des arbres, comme on le montre avec
des mesures de flux de sève (figure ci-contre).
Les variations de transpiration d’un arbre à l’autre sont principalement liées au statut social des
arbres dans le peuplement : les arbres dominants sont ceux qui transpirent le plus, ayant à la fois
de plus fortes sections conductrices (bois d’aubier), des surfaces foliaires élevées. D’autre part,
leurs houppiers reçoivent davantage de rayonnement que les arbres plus petits, dont une grande
proportion de houppier est à l’ombre.
Dans une parcelle forestière, il peut y avoir des variations spatiales, en relation avec
l’hétérogénéité du sol ou celle du couvert (cloisonnement, trouées).
La modélisation du bilan hydrique nécessite toutefois de se placer dans les conditions les plus
homogènes possibles. Ainsi, une parcelle hétérogène devra être traitée en sous-éléments plus
homogènes. C’est d’ailleurs ce que l’aménagiste tend à réaliser en définissant des unités
élémentaires de gestion.
Au cours d’une journée ensoleillée, sans déficit en eau dans le sol, la transpiration d’un peuplement est typiquement de l’ordre de 2 à 4 mm/jour (=20 à 40 m3 d’eau/ha). A partir du moment où le peuplement est fermé, l’âge intervient peu. En d’autres termes, s’il y a 2000 arbres (peuplement jeune) par hectare, chacun transpirera entre 10 et 20 litres d’eau par jour. S’il y a 200 arbres (peuplement âgé) leur transpiration sera de l’ordre de 100 à 200 litres par jour.
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